Les lumières du Ritz-T2-Les heures sombres by PION Marylène

Les lumières du Ritz-T2-Les heures sombres by PION Marylène

Auteur:PION, Marylène [PION, Marylène]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Auteurs Québécois
Éditeur: Les Éditeurs réunis
Publié: 2021-08-31T22:00:00+00:00


7

Julien, le nez plongé dans le journal, écoutait sa tante et sa sœur bavarder pendant qu’elles desservaient la table. Philomène avait apporté une tarte au sucre qu’ils dégusteraient dès que la vaisselle serait lavée. La tradition des soupers du dimanche, tant chez eux que chez Philomène, s’établissait peu à peu et Julien se surprenait à prendre plaisir à ces réunions familiales. Pendant longtemps, sa sœur et lui avaient partagé le repas dominical le cœur rempli de chagrin en pensant à leur défunt père. La présence de Philomène leur rappelait qu’ils n’étaient plus seuls. Leur tante, qu’ils avaient perdue de vue trop longtemps, faisait de nouveau partie de leur vie.

Les deux femmes se racontaient leur semaine au Ritz. L’hiver s’installait tranquillement et l’achalandage avait diminué à l’hôtel. L’été et l’automne 1914 avaient été prospères malgré le début du conflit en Europe. Julien avait pu le constater lui aussi, car plusieurs clients s’étaient présentés et il avait dû porter leurs nombreux bagages. Maintenant qu’une neige fine recouvrait tranquillement les rues, le nombre de touristes avait baissé. Les bals et les concerts se succédaient à l’hôtel en ce froid mois de novembre qui annonçait un hiver qui serait probablement long.

Julien reporta son attention sur les journaux qu’il avait cumulés au fil de la semaine. Ce n’est qu’aujourd’hui qu’il avait le temps de les lire. En effet, le soir, quand il rentrait, il soupait avec Adéline et se couchait tôt pour se lever en pleine forme le lendemain. Les grands titres des journaux annonçaient quelques victoires des Alliés sur le front. Selon les informations qu’ils contenaient, un régiment entier d’Allemands avait été anéanti. Ces nouvelles étaient encourageantes, même si la guerre semblait loin d’être gagnée. En octobre, il avait assisté avec Marius, Jerry et plusieurs autres collègues du Ritz à l’importante manifestation qui s’était tenue au parc Sohmer. Un grand sentiment patriotique s’était emparé des esprits des participants. Même si Marius et lui se montraient plutôt hostiles à la contribution des Canadiens à la guerre, ils s’étaient laissé submerger par cette envolée nationaliste. La création d’un régiment de Canadiens français peu de temps après avait suscité l’intérêt de nombreux hommes qui avaient décidé de s’enrôler volontairement. Guillaume Forget, le liftier, y songeait alors que deux commis de cuisine que Marius connaissait avaient rallié les rangs du 22e bataillon canadien-français. Il était alors facile de le faire, les intéressés pouvaient se rendre directement dans les bureaux du journal La Patrie ou simplement remplir un formulaire d’enrôlement disponible dans le journal. Il suffisait d’y inscrire son nom, son occupation, son âge, son état marital et son adresse et de poster le tout au journal qui transmettrait les informations au bataillon. N’importe qui était donc en mesure de s’enrôler, pensa tristement Julien. La veille, Jerry leur avait annoncé officiellement, à Marius et à lui, qu’il s’enrôlait lui aussi malgré leurs mises en garde. L’idée de savoir son ami de l’autre côté, combattant les Allemands, inquiétait et affligeait Julien.

— Le lavage de la vaisselle est terminé, Julien, tu peux maintenant lâcher ton journal ! annonça Adéline pour se moquer de lui.



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